Le gouvernement Macron est généralement passif en termes d’écologie.
Interview de Romain Guillot, président de l’association Eco Avenir

Tout d’abord, présentez-vous. 

Romain Guillot, 19 ans, étudiant dans le domaine de l’environnement, président de l’association Eco Avenir

Les agriculteurs s’opposent aux politiques environnementales. Qu’est-ce que vous en pensez ? 

Tout d’abord, je pense qu’il est important de savoir de qui on parle. Je ne pense pas que les agriculteurs en général s’opposent aux politiques environnementales, je pense que le problème c’est plutôt que les normes environnementales qui sont européennes ne sont parfois pas respecté dans l’ensemble des pays de l’union. Ainsi, on leur demande de respecter certaines normes, ce qui est tout à fait normal, mais d’un autre côté on importe des produits qui viennent d’autres pays qui eux ne le respecte pas. Pour nos paysans, c’est une sorte d’agriculture déloyale qui se met en place. Cependant, contrairement à ce que propose certains syndicats, à mon sens, il ne faut pas que la France abroge ces normes, mais plutôt qu’elle se concentre à réduire son importation, et à mettre en valeur nos cultures locales. Aujourd’hui, il est certain, qu’il faut consommer autrement, Privilégier les circuits courts et les petits producteurs, mais l’autre problème que je peux soulever derrière tout ça c’est l’emprise que peuvent avoir certains syndicats comme la FNSEA. Son président, Arnaud, Rousseau, possède plus de 700 ha de terres agricoles, ce qui est considérablement plus gros, que la moyenne des agriculteurs aujourd’hui en France. De plus, il est le président de Avril, une société d’Agro business. Ainsi, il est également responsable de la libéralisation du marché agricole, et de certains traités de libre-échange qui nuisent à l’agriculture française. Ainsi, une des solutions serait de changer totalement de modèle agricole, de permettre aux agriculteurs et agricultrices de France, de pouvoir être aidé pour faire en sorte qu’il y ait une vraie transition vers un modèle plus respectueux de l’environnement, moins productiviste, et beaucoup plus rémunérateur pour les agriculteurs.

Dans l'un de ses discours à l’Assemblée Nationale, Attal a accusé les écologistes d'être responsables de la condition des agriculteurs. Qu’en pensez-vous en tant que militant écologiste ?

Le premier ministre fait du Macron. Depuis plusieurs années, les différents gouvernements ont mise en avant une politique de criminalisation du mouvement écologiste. Tout ça est évidemment une manœuvre politique, pour faire en sorte que les gens s’éloigne du domaine de l’environnement, parfois également pour qu’ils occupent le réel problème du changement climatique. Ce discours est extrêmement dangereux, déjà parce qu’ils emploient des mots très fort, après les manifestations de Sainte Soline, on a pu entendre Darmanin (ministre de l’intérieur, accusé de plusieurs agressions sexuelles) employer le mot de « Écoterroristes » pour désigner les mouvements écologistes. C’est extrêmement dangereux, car tout cela a pour effet de faire monter en flèche, l’extrême droite, le climatoscepticisme et la violence.

Certains pensent que le gouvernement Macron est passif envers les politiques environnementales de l'Union européenne. Quelle est votre opinion ?

Le gouvernement Macron est généralement passif en termes d’écologie. Rappelons tout de même que la France a été condamné à plusieurs reprises pour inaction climatique.  Ces gens-là n’ont que faire du climat, seul le profit compte, et pour eux, la vision économique est supérieure à l’environnement. À mon sens, les normes écologiques ne vont pas assez loin, mais si l’on veut pouvoir mettre des normes plus dures, et plus juste en termes d’écologie, il faut aussi pouvoir proposer une solution à nos agriculteurs, et cela passe bien entendu comme je l’ai dit précédemment, à les aider pour qu’il puisse changer de système. Tout cela, le gouvernement Macron ne le fait pas, et ce n’est pas dans leur intérêt. Nous avons pu le constater il y a quelques jours avec les manifestations, certains agriculteurs, souhaitaient bloquer le marché de Rungis, pilier de l’économie productiviste agricole en France, jusqu’alors, la doctrine, gouvernement a été de ne pas envoyer les forces de l’ordre au contact des agriculteurs, mais dès que des grandes surfaces, des bâtiments économiques sont bloqués, là il y a intervention des forces de l’ordre. Cela résume bien la mentalité de ce gouvernement, les chiffres avant l’environnement.

Macron a-t-il la capacité de résoudre la crise des agriculteurs et de répondre à leurs besoins vitaux ?

Non, il n’en a ni la capacité ni l’envie. Pour cela, il faudrait entamer un bras de fer avec les différents lobbys investir dans une politique de transition de modèle, tout cela coûte de l’argent, et cet argent, le président Macron préfère l’investir dans la généralisation de l’uniforme à l’école, ou encore dans les jeux olympiques.

Selon vous, les préoccupations des agriculteurs dans ces manifestations sont-elles plus environnementales ou économiques ?

Je pense honnêtement qu’elles sont d’abord économiques. Si les agriculteurs peuvent parfois être hostiles à l’égard des militants écologistes ou encore de l’Europe, c’est avant tout, parce que les syndicats telles que la FNSEA ou la coordination rurale, mais bien sûr aussi le gouvernement, ont fait croire aux agriculteurs qu’ils étaient responsables de tous leurs malheurs. Or, depuis le mouvement, ni le gouvernement, ni la FNSEA, n’a évoqué le sujet de la rémunération des agriculteurs, qui est pourtant un des sujets les plus préoccupant. Les agriculteurs, mieux rémunéré, qui produisent pour nourrir localement une population, pour faire vivre un territoire, c’est avant tout des paysans, heureux, fier de leur métier et donc de facto, quand on est fier de ce que l’on fait, on le fait bien. Et c’est dans ce sens que naturellement, des normes écologiques pourront être respecté et instaurer sans qu’il n’y soit le moindre problème. Le problème, ce n’est pas les normes, c’est ce que l’on leur demande de faire. On leur demande de produire plus, pour exporter toujours plus, forcément, au bout d’un moment ce n’est pas tenable. Je regrette aussi que l’on ne parle pas assez du métier d’éleveurs, aujourd’hui on le voit, il y a des solutions proposées pour les vignerons, qui est une profession tout à fait respectable, mais qui fait partie des professions les plus riches du monde agricole, alors que les plus pauvres, ce sont les éleveurs. 

Pour conclure, je pense que nous nous retrouvons encore une fois de plus, dans une impasse, dans une joute d’éléments de langage, entre le gouvernement et la FNSEA, qui fait semblant d’être l’opposition, alors qu’ils sont responsables des politiques gouvernementales en termes d’agriculture depuis plus de 20 ans. Pour sortir de cette crise, il faudrait que la majorité des paysans puisse se détacher de ces syndicats, et qu’il soit épaulé vers une vraie transition, pour sortir de ce modèle, à bout de souffle qui les tueras et vivre enfin de leur si beau métier. 
Cependant, je me félicite tout de même, que certains paysans et depuis longtemps, ont compris cela, et qu’un syndicat, comme la confédération paysanne, lutte pour une agriculture plus juste, plus rémunératrice pour les paysans et respectueuse de l’environnement. C’est tout ce que je souhaite au monde paysan pour l’avenir.
 

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